Outils de la transformation digitale : le document collaboratif à l’oeuvre / Thibault Champey

Parmi les outils de la transformation digitale, on retrouve ceux permettant le travail à plusieurs sur un document. Création, édition, ajout de commentaires, regroupement et partage de fichiers de travail, suivi des modifications et des versions, sécurisation des données, création de niveaux d’accès par profils d’utilisateurs… les fonctionnalités du document collaboratif répondent aux nouveaux modes d’organisation du travail. Et c’est précisément le propos de l’intervention de Thibaut Champey, Head of Channel Solutions Architect à Dropbox. Ou plutôt non, le sujet posé étant formulé « EFSS et Transformation Digitale« .

« OK Google, c’est quoi l’EFSS »…

Ne cherchez pas plus loin ! EFSS, ce n’est ni l’Ecole Française de Feng Shui, ni l’European Federation of Funeral Services et encore moins l’European Federation for Freshwater Sciences… mais plutôt Enterprise File Synchronization and Sharing ! Une appellation plus technique de ce que communément on pourrait appeler  « drive » ou  dossier partagé en ligne. Mais peu importe l’appellation. Pour Thibault Champey, l’outil n’est pas la première étape d’une transformation digitale. « Pendant trop longtemps, la technique et ses outils ont été installés et posés comme des préalables indispensables à tout projet de transformation numérique dans les industries, ce temps-là est révolu… et c’est un ingénieur de formation qui vous le dit ! » explique en préambule de son intervention le responsable de Dropbox, « pour la plupart des entreprises, la transformation digitale est un leitmotiv mais les raisons de la faire sont plus floues, l’outil est souvent placé en premier et tout aussi souvent, l’échec est au bout. »

Créativité, création de la valeur de l’entreprise pour tous ou l’innovation généralisée

Rappeler le contexte socio-technico-économique de la transformation digitale permet de resituer tout à tour et sans exhaustivité : l’accélération technologique de la production et de la circulation de l’information, le renversement du rapport de force à la faveur des consommateurs-clients face aux entreprises-producteurs appuyés par les réseaux sociaux, la rupture entre entreprises traditionnelles et start-ups ou géants du numérique… Et d’en tirer comme conséquence la primauté accordée à l’innovation et à ses corollaires indispensables, « l’agilité, la créativité et la vitesse » infusés à tous les niveaux de l’entreprise et à tous ses collaborateurs.

« C’est un vrai changement de culture pour les entreprises » explique Thibault Champey, « vers la culture de l’innovation« . Concrètement, cela signifie créer des organisations et des espaces dans lesquels les équipes ont envie de travailler. L’installation d’un baby-foot et sièges aux couleurs flashy dans une salle de réunion ne suffiront pas : non, on parle plutôt « de créer une dynamique pour que les employés apportent leur créativité, soient en mesure de contribuer à la valeur de l’entreprise » quelques soient leurs services ou domaines d’activités dans l’entreprise, et pas uniquement cantonnée aux directions de l’innovation, une stratégie « contre-intuitive et contre-productive« .

L'innovation a besoin d'un contexte favorable pour émerger. Pas juste d'un simple interrupteur magique...

L’innovation a besoin d’un contexte favorable pour émerger. Pas juste d’un simple interrupteur magique…
Pixabay – CC0 Creative Commons – bit.ly/2HVt1fh

L’innovation ne se décrète pas mais les conditions favorisant son émergence se préparent. Et ce, dès le recrutement, selon Thibault Champey, étape qui devrait pouvoir être assurée par plusieurs collaborateurs, notamment ceux appelés à être directement en relation avec le candidat. « On peut parler d’un processus analytique et objectif, réalisé à partir d’un guide d’entretien, destiné à éviter les biais très courants comme le recrutement par copinage pour favoriser l’analyse des compétences, expériences, références, « fit » culturel, accomplissements personnels…  par une diversité de personnalités » explique notre intervenant.

Les conditions d’une collaboration fructueuse demandent ensuite, « pour pouvoir conserver les talents« , de trouver le bon équilibre entre rémunération attractive, extras (jours de congés supplémentaires, nourriture, clubs de sport…) et modalités d’évolution (formations, facilités de changements de fonctions ou de lieux de travail). Sans oublier : tout ce qui ne se compte ou ne se chiffre pas. « Quelle est la chose la plus importante pour un employé ? L’argent en fait partie bien sûr, mais avoir un but, une mission sont plus importants encore » soutient Thibault Champey, qui cite l’exemple de SpaceX  dont la mission de l’entreprise, que les collaborateurs peuvent s’approprier est tout simplement… de « coloniser la planète Mars« . La construction de fusées et la commercialisation de voyages dans l’espace ne sont que des moyens et des objectifs intermédiaires pour y parvenir…

Partage de l’information

Pour que chacun puisse contribuer au collectif, encore faut-il que la connaissance qu’ont les collaborateurs de l’activité et de la stratégie de l’entreprise soit complète et transparente. Séances de questions-réponses entre direction et équipes, informations régulières sur les activités et la stratégie de l’entreprise… de la qualité de l’information, dépendra la qualité de la collaboration entre les équipes au sein de l’entreprise. Cette confiance est également favorisée par les projets personnels auxquels chacun peut consacrer 20% de son temps de travail. « La création de valeur pour l’entreprise est aujourd’hui démontrée, chez Dropbox, nous estimons que 30% des nouvelles fonctionnalités d’un produit sont inspirés par des idées ou des projets travaillés lors de ces moments, appelés Hack Week en interne » estime Thibault Champey. La convivialité des espaces de travail contribue également à instaurer un climat propice au collaboratif, les collaborateurs peuvent se rencontrer plus facilement pour échanger sur leurs projets et instaurer des relations de travail collectives marquées par le sceau de l’agilité : lancement rapide des idées, partage dans un collectif, boucles d’itérations courtes, expérimentation et analyses des retours constants et bien entendu « accepter l’échec » !

Finalement : l’EFSS ou le document collaboratif

C’est dans ce contexte que les outils numériques collaboratifs interviennent, notamment les EFSS, présentés au début de cet article. Leur valeur ajoutée ? La chaîne classique de travail des outils traditionnels de création de documents procèdent de manière séquentielle : je fais un document, je  l’envoie à une ou plusieurs personnes, je crée une deuxième version par mail, « on se retrouve rapidement à travailler sur des versions différentes« … Faciliter le travail à plusieurs sur un même document, sécuriser les versions, réduire les risques de pertes de temps, mieux prendre en compte les commentaires et idées de chacun… le document collaboratif démontre ses apports. « La finalité est de supprimer le travail sur le travail, disposer d’accès plus faciles à l’information et être plus efficace, déplacer des usages liés au mail  vers des outils plus adaptés, comme par exemple les discussions à plusieurs » résume Thibault Champey.

Reste à choisir le bon outil dans un éco-système foisonnant. « Les acteurs du marché sont nombreux, les types d’outils aussi qui vont des suites collaboratives classiques à des solutions plus diverses et plus ou moins complètes comme Slack, Trello, Asana, Mindmeister, Basecamp, Google Keep » rappelle Thibault Champey, qui renvoie vers l’étude du cabinet de de conseil Gartner pour un aperçu du marché.

 

Le cabinet Gartner propose un guide des solutions collaboratives ou Content Collaboration Platforms, également appelées EFSS.

Le cabinet Gartner propose un guide des solutions collaboratives ou Content Collaboration Platforms, également appelées EFSS.

Les fonctionnalités importantes et indispensables de ces suites couvrent plusieurs domaines :

  • Synchronisation efficace des données sur tous les appareils
  • Envoi de liens pour partager des fichiers
  • Outils de création, d’édition et de prévisualisation
  • Gestion des versions d’un document et suivi des modifications
  • Gestion des partages et des permissions
  • Protection du contenu par des mécanismes d’encryption, antivirus, compliance et RGPD
  • Intégration avec le patrimoine IT de l’entreprise

Sur la méthodologie du choix de l’outil et de la solution, une série de questions ou de vérifications peuvent être conseillées :

  • Quelle adéquation avec la culture d’entreprise : plutôt structurée ou  libérale ?
  • Rechercher la simplicité pour faciliter le processus de création
  • Adapté à des usages en mobilité
  • Tester avec de vrais utilisateurs et pas l’IT : « ne pas laisser l’IT choisir !« 
  • Mesurer l’impact sur la productivité ou le confort d’utilisation, quantifier en minutes et par personnes…
  • Prendre des cas d’usages : comprendre ce que font les utilisateurs et comment l’outil peut aider à mieux faire. Ensuite, peut détailler comment faire autrement.
  • Enfin, si le déploiement ou la prise en main ne réussissent pas : « passer à un autre outil ! »

Mais pas de précipitation vers le dernier outil à la mode sous peine de voir les projets échouer car « le choix d’outils intervient en dernier, après avoir créé un état d’esprit collaboration et définit les projets » prévient le responsable de Dropbox qui rappelle que « les projets de transformation ne sont pas des projets techniques mais sont à 80% des projets organisationnels et de conduite du changement ».  Expliquer et présenter à ses équiper les changements de leurs méthodes de travail peut par exemple prendre la forme de scénari de cas d’usages « avant/après » et d’une présentation claire des bénéfices obtenus pour remporter l’adhésion des personnes directement concernées par le changement de leurs habitudes.

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